"Parfaitement pop", "un des plus beaux disques de l'hiver", "songwriting sans égal par chez nous", "compositeur et arrangeur de premier plan"... pouvait-on lire dans les pages "culture" de nos journaux préférés au sujet de Southern Kind Of Slang (2010), premier album de Julien Pras. 2013 commence en fanfare, avec la sortie de Shady Hollow Circus, second long format de ce musicien ubiquiste, actif chez Calc, croisé chez Pull ou Victory Hall.
"A l'âge de huit ans, j'ai habité avec ma famille aux Etats-Unis dans un quartier appelé Shady Hollow Circle". Julien Pras n'a manifestement rien oublié de ses deux années passées Outre-Atlantique : les grands espaces, les nuits sans sommeil, les contes merveilleux et cruels.
Le thème du cirque et son ambivalence - l'onirisme, la magie, mais aussi les lions en cage, les freaks, le clown triste - sont évoqués par petites touches, notamment sur "Watchman Blues", en dernière piste. La vie n'est ni triste ni gaie, semble dire le Bordelais. Elle est un peu des deux. Et nous devons trouver plus notre place dans ce monde flottant. Autres thèmes ici récurrents : le fait d'être le plus souvent spectateur des évènements que véritablement impliqué, et le besoin d'évasion, de retour à l'enfance. L'artwork, signé Lucie De Cyracuze, est en parfaite adéquation avec la matière.
Savamment orchestré, ce nouveau recueil de chansons est à l'image de son auteur : exigeant. La filiation commode avec le regretté Elliott Smith a fait long feu. Le musicien a, depuis ses premiers pas en solo, sa propre tonalité. Que l'on se rassure, la mélancolie ne l'a pas quitté, et l'inventivité est intacte. "Arrangé de façon moins conventionnelle, Shady Hollow Circus est peut-être plus aventureux d'un point de vue mélodique et en termes d'atmosphères". Faite d'envolées féeriques, au croisement de Robert Sherman et de Danny Elfman, interprétée as usual en anglais, cette nouvelle collection de chansons, à la dimension internationale, distille un parfum tenace au fil des écoutes.
Ces deux dernières années, entre tournée à l'étranger avec son énième side project, Mars Red Sky (150 concerts dans 16 pays), et la promotion de son premier album solo, Julien Pras a écrit, arrangé, joué sur de multiples instruments, produit, mixé avec une maniaquerie peu commune chacun des douze titres de ce Shady Hollow Circus. De rares invités ont apporté leur compétence : Julien Tirbois au violon sur "Missionary Run" et" Watchman Blues". Helen Ferguson se charge des choeurs sur quatre titres, et remplace avec panache la voix amie d'Emily Jane White, venue lui prêter main forte sur l'album précédent, et que Julien accompagne régulièrement sur scène (basse et choeurs). Enfin, Stéphane Teynié est responsable du matriçage.
"Avec cet album, je ne voulais pas me limiter à une quelconque formule, j'étais prêt à essayer tout ce qui me passerait par la tête". Dès la première écoute, on en prend la mesure. Orgue futé ("Seven more hours") ou violons indociles ("Missionary run"), réminiscences liverpuldiennes ("Funeral mute"), chair de poule à tous les étages, le bonhomme sait y faire et déploie une large palette de couleurs pop et d'ambiances top. Avec Shady Hollow Circus, Julien Pras a conçu son projet le plus ambitieux à ce jour. Il est un travailleur de l'ombre, un de ceux qu'on aimerait voir davantage en lumière, encore et toujours.
Franck Ducourant
Discographie
Julien Pras
Southern Kind Of Slang - Mars 2010
Shady Hollow Circus - Janvier 2013
(sélective) avec Calc
Any Downs At All - Février 2003
12 Steps To Whatever - Mai 2005
Dance of the Nerve - Octobre 2007
Julien Pras en concert mardi 5 juillet à Paris, Le Batofar, dans le cadre de la chouette soirée Tahiti 80 & Friends !
Plus d'infos sur le site du Batofar.
par Julien Pras
Nouvelle échappée solitaire pour l'enchanteur de Calc et Mars Red Sky, qui continue d'élever ses compositions à des hauteurs inexplorées par chez nous. Chair de poule à tous les étages, le bonhomme sait y faire et déploie une large palette de couleurs pop et d'ambiances top. Son projet le plus ambitieux à ce jour.