Julie Doiron

Plus au nord, il y a Julie, canadienne barroudeuse, la tête dans les étoiles et les pieds toujours sur la route. Personnalité attachante, Julie Doiron saura attacher votre coeur au sien.

La première fois que j’ai rencontré Julie, c’était il y a quatre ans, lors de la deuxième édition du Bloomington Fest, dans l’Indiana, organisé par le label Secretly Canadian. Elle tournait alors avec son amie Shannon Wright, qu’elle rejoint aujourd’hui sur Vicious Circle pour une distribution hexagonale digne de ce nom. Sa performance intimiste, pratiquement en catimini, avait coupé le souffle et tiré des larmes de l’auditoire du Rhino’s Youth Club, plutôt habitué à des concerts de hardcore militant et de lesbiennes végétariennes. Hébergés tous deux chez le même hôte, nous avions parlé en français, tard dans la nuit suburbaine, de sa carrière en solo émergente. La cuisine vibrait de sensations nouvelles et Julie nous avait souhaité bonne nuit. Tôt, le lendemain matin, elle était déjà repartie vers d’autres cieux nord-américains, défendre son art de singer/songwriter sur scène, non sans avoir déposé sur le sofa du salon l’intégralité de sa discographie naissante, comme une vieille amie qui vous prêterait en cachette ses romans préférés. C’est ainsi, discrètes mais tellement familières, que s’appréhendent les chansons de Julie Doiron.

Aujourd’hui, elle a visiblement arrêté de souhaiter bonne nuit à tout va, publiant le touchant Goodnight Nobody. Sur ce sixième opus, la présence lumineuse de ses trois amis parisiens d’Herman Düne renforce le sentiment de complicité immédiate qui se dégage de sa musique, organique en diable et servie par un chant de plus en plus cristallin.

Elle a commencé sa carrière à l’âge de dix-huit ans comme bassiste au sein d’Eric’s Trip une formation canadienne de folk rock psychédélique signée sur Sub Pop, le label de Nirvana. Elle était alors encore étudiante en photographie. Après l’implosion du groupe en 1996, dans les brumes maritimes du New Brunswick, Julie s’est véritablement lancée en solo avec son merveilleux premier album, Broken Girl, du nom des sentiments dévastateurs qui la traversaient à l’époque. Elle y doutait magnifiquement, avec un chant en anglais lacrymal à souhait, en dépit de ses origines francophone. Publié sur son propre label, Sappy, ce disque a été réédité sur Jagjaguwar en 2002. Un deuxième album, Loneliest In the Morning, a été enregistré à Memphis en 1997 et publié sur Sub Pop.

Installée à Montréal avec son mari et ses trois enfants, Julie a depuis poursuivi une carrière sans faille, où doutes existentiels et joies de la maternité cohabitent en harmonie de plus en plus parfaite à chaque nouvelle sortie. Inaugurée par le ep Will You Still Love Me ?, en 1999, sa collaboration avec les Wooden Stars d’Ottawa, se poursuit le temps d’un troisième album aussi simple qu’émouvant, Julie Doiron & The Wooden Stars. Cet album lui vaut de remporter un Juno en 2000, Victoire de la Musique canadienne que son ancien groupe n’avait jamais obtenu. Elle publie dans la foulée un livre de photos hivernales.
Elle a depuis publié deux autres disques sur Jagjaguwar, dont Désormais, un album chanté dans sa langue natale, où elle retrouve ses racines françaises, avec une fragilité désarmante. Régulièrement, autant que sa vie de mère de famille le lui permet, elle tourne, et publie des disques chargés d’émotions, toujours illustrés par son mari, John Clayton.
Le dernier en date, Goodnight Nobody, nous touche droit au cœur, dédicacé à « ceux qui ont aimé, qui ont perdu et ont aimé de nouveau ». Julie Doiron, le secret le mieux gardé du Canada ?

Florent Mazzoleni

Goodnight Nobody

par Julie Doiron

SORTIE: 19/10/2004

1. Snow Falls In November Julie Doiron 5:19
2. Sorry Part III Julie Doiron 2:31
3. Last Night Julie Doiron 3:07
4. No Moneymakers Julie Doiron 3:40
5. Tonight Is No Night Julie Doiron 1:28
6. Dirty Feet Julie Doiron 3:17
7. Dance All Night Julie Doiron 3:22
8. When I Awoke Julie Doiron 3:05
9. The Songwriter Julie Doiron 5:07
10. Some Blues Julie Doiron 3:48
11. Banjo Julie Doiron 3:38
12. Good Night Julie Doiron 3:00